Une étude démontre que les Cuma sont une solution pour réduire l’utilisation des pesticides

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"Plus il y a de membres de Cuma sur un territoire, moins il y a de consommation de pesticides." Une étude récente réalisée par des chercheurs de l’Université de Rennes et de l’Institut Agro Rennes-Angers et publiée dans la revue scientifique Ecological Economics met en lumière l’impact environnemental positif des Cuma sur la réduction de l’utilisation des pesticides en France.

Cuma

Comprendre et valoriser l’action collective

La France se situe dans la moyenne européenne de consommation de produits phytosanitaires avec 3,62 kg/ha de terre cultivée (FAO, 2021), mais cette consommation ne cesse de s’accroître (+6 % entre 2011 et 2020 selon Eurostat), alors que la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires est un enjeu majeur dans la transition agroécologique. Face à ce défi, la Cuma peut constituer une solution pertinente.

Partant du postulat que les interactions sociales entre membres des Cuma agissent comme un puissant facilitateur institutionnel pour une transition agroécologique, un partenariat engagé depuis dix ans entre la FNCuma et les chercheurs de l’Université de Rennes et l’Institut Agro Rennes-Angers a permis d’étudier finement les bénéfices environnementaux de la coopération agricole de proximité, avec cette question : 

Comment l’action collective menée par les membres au sein de coopératives locales [notamment les Cuma] incite les agriculteurs à réduire leur utilisation de pesticides dans leurs activités agricoles ?

En collaboration avec la FNCuma, les chercheurs Simon Cornée, Damien Rousselière et Véronique Thelen ont utilisé une base de données couvrant 5 793 Cuma, soit 64 % des coopératives répertoriées au niveau national, pour analyser deux mécanismes clés :

1. Le rôle des interactions sociales : Les interactions sociales entre agriculteurs membres des Cuma favorisent l’adoption de pratiques réduisant l’usage des pesticides.

Hypothèse 1 : La densité de membres de Cuma dans une zone donnée entraîne une réduction de l’utilisation des pesticides dans cette zone et dans les zones voisines.

2. L’impact de l’utilisation des équipements partagés : Les équipements agroécologiques, lorsqu’ils sont partagés et utilisés intensivement, permettent des gains techniques et environnementaux significatifs.

Hypothèse 2 : Une utilisation plus intensive des équipements agroécologiques d’une Cuma entraîne une réduction accrue de l’utilisation des pesticides.

-7,28% d’utilisation de pesticides grâce aux Cuma

L’étude révèle des résultats clairs et prometteurs quant à l’impact environnemental positif des Cuma sur un territoire.

La densité de membres de Cuma dans une région réduit significativement l’utilisation des pesticides. Chaque membre supplémentaire d’une Cuma entraîne une diminution de 0,07 % de l’utilisation locale des pesticides. De même, une augmentation de 1 % de la proportion de membres de Cuma parmi les agriculteurs d’une zone réduit l’utilisation des pesticides de 0,08 %. Des externalités positives sont observées dans les régions voisines des Cuma actives. Les pratiques innovantes des membres influencent également les agriculteurs non membres, renforçant ainsi l’impact des Cuma au-delà de leurs frontières directes.

Ainsi, “passer d’une zone sans membre de CUMA à une zone ayant en moyenne 104 membres (la moyenne dans les zones où il existe au moins une CUMA) se traduit par une réduction de 7,28 % de l’utilisation des pesticides.”

Enfin, contrairement aux équipements agricoles conventionnels, dont le partage n’a pas d’effet sur la réduction des pesticides, les équipements “agroécologiques” partagés ont un impact déterminant sur la réduction des pesticides. Une utilisation accrue de ces équipements spécialisés favorise des pratiques agricoles plus respectueuses de l’environnement. 

Des politiques publiques qui auraient intérêt à s’appuyer sur les collectifs pour être plus impactantes en matière de réduction des produits phytosanitaires

Pour Philippe Martinot, Secrétaire Général de la FNCuma, “cette étude appuie l’importance du développement du modèle Cuma sur le territoire français, comme un levier puissant en matière d’action collective pour réduire les pesticides”. Leur potentiel pour accompagner la transition vers une agriculture durable doit être pleinement exploité. En soutenant ces coopératives, la France peut faire un pas de plus vers un avenir agricole respectueux de l’environnement et de la santé publique : 

Des résultats qui font échos au récent plaidoyer de la FNCuma en faveur d’une mécanisation responsable, durable et vivable et à ses propositions.

Le rôle déterminant de l’écosystème fédératif construit autour des Cuma 

La présence d’une structure fédérative est déterminante pour la pérennité des organisations collectives de partage de matériel agricole. Dans un article publié en juin 2022 dans les Cahiers du développement coopératif, nos partenaires chercheurs présentent les différentes modalités de partage de matériel agricole documentées dans le monde en s’appuyant sur la notion de Communs développée par la politologue et économiste américaine Elinor Ostrom, prix nobel d’économie en 2009, qui s’applique aux Cuma. 

Concernant les Cuma, les chercheurs soulèvent également le rôle capital du réseau fédératif :

Dans le cas des Cuma, la présence d’un réseau fédératif en soutien à ses membres semble faciliter la transition de la gestion de l’institution à la génération suivante de coopérateurs. […] D’autre part, l’enchâssement d’unités à différents niveaux permet d’aborder et de régler à un niveau plus large des problématiques partagées par les structures individuelles et la mise en place d’une représentation institutionnelle unique qui favorise la reconnaissance du réseau par les pouvoirs publics.

Nos partenaires poursuivent leurs travaux, en se penchant à présent sur le rôle et l’impact du réseau fédératif dans le développement des Cuma, dans le cadre du projet 2IDCUMA.

Plus d’informations sur le projet

2IDCUMA

2022-2025

Identifier la contribution des organisations collectives à la transition agroécologique, en s’intéressant spécifiquement au cas des Cuma.