Robots des Champs : une journée au cœur de l’innovation
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Heuqueville (Eure), mardi 25 novembre. Plusieurs dizaines d’agriculteurs et de partenaires se retrouvent à la salle des fêtes, tout près de l’exploitation de Laure et Tanguy Bidaud. Objectif : découvrir le robot autonome AgBot T2 d’AgXeed et lancer concrètement le projet régional Robots des Champs, financé par le PEI – Région Normandie. Une journée à la fois technique, humaine et résolument tournée vers l’avenir.
Comprendre, analyser… et écouter ceux qui l’utilisent déjà
Les équipes de TecMat (le concessionnaire) et AgXeed ouvrent la journée. Paramétrage, fonctionnement, logiciels, agencement des outils… les participants plongent dans l’écosystème du robot.

Très vite, la théorie laisse place au vécu de celles et ceux qui l’utilisent au quotidien : Laure et Tanguy Bidaud, installés à proximité et utilisateurs d’un AgBot depuis l’été 2024.
Leur retour d’expérience, franc et précis, éclaire les enjeux réels de la robotisation sur une exploitation. Tanguy explique que leur réflexion est venue d’un constat simple : les matériels se complexifient, deviennent plus lourds, plus puissants, sans toujours garantir un gain équivalent en efficacité ou en résultats économiques. Dans un contexte où la disponibilité de main-d’œuvre est incertaine et où la préservation des sols devient centrale, continuer à monter en gamme sur des tracteurs toujours plus massifs ne leur paraissait plus adapté.
À l’inverse, l’approche robotique ouvre d’autres perspectives. Tanguy décrit un arbitrage devenu crucial entre matériels lourds à hauts débits de chantier mais très dépendants des fenêtres météo, et matériels plus légers capables d’intervenir plus souvent, plus longtemps et dans davantage de conditions. Le robot, plus léger, permet précisément cela : élargir les créneaux d’intervention, réduire le tassement, et lisser l’organisation du travail. Il rappelle qu’avant de se lancer, ils ont comparé l’option robot à leur référence habituelle : un tracteur de 300–350 chevaux équipé d’un outil semi-porté de 5 mètres.
Laure apporte un complément essentiel, plus humain et tout aussi déterminant dans leur choix.
« Ce n’est pas parfait… mais oui, ça change la qualité de vie. Je peux laisser le robot au champ et rentrer m’occuper des enfants, ou aller à un repas de famille pendant qu’il déchaume. »
Elle souligne aussi que, malgré un débit de chantier plus faible, le robot compense par sa capacité à travailler beaucoup plus longtemps. Sur les parcelles délicates, avec de nombreuses manœuvres, il peut même se montrer meilleur qu’un opérateur humain.
Les chiffres confirment cette utilisation intense : 600 heures réalisées en trois mois, avec déjà 300 heures prévues au printemps. À terme, Tanguy estime que le robot pourrait réaliser 800 à 1 000 heures par an, grâce à la facilité d’adaptation des outils de 3 à 4 mètres et à la possibilité de combiner robot et tracteur si nécessaire.
« Si c’était à refaire, nous le referions », concluent-ils.

Un témoignage inspirant, qui pose des bases concrètes pour la suite du projet.
Robots des Champs – Passons à l’action !
Après le déjeuner, les partenaires du projet Robots des Champs – Passons à l’action ! (Partenariat Européen pour l’Innovation – Région Normandie) — fédérations de cuma, UniLaSalle, Littoral Normand — se retrouvent en comité de pilotage.
Objectif : cadrer les premières actions des 36 mois où ils vont travailler ensemble pour construire un référentiel robotique, suivre des machines autonomes en conditions réelles, analyser les résultats, former, analyser, modéliser… Au final, il s’agira de donner des repères fiables aux agriculteurs et aux cuma par rapport à ces nouvelles machines.
Au cours de cette séquence de travail en salle, ils ont pu bénéficier du retour d’expérience d’Arvalis, présenté par Pauline Mangin, à partir des essais menés sur la ferme expérimentale de Saint-Hilaire-en-Woëvre. Les données consolidées seront dévoilées lors du Digicolloque Arvalis du 25 mars 2026.
Une fin de journée au champ
Tous rejoignent ensuite la parcelle des Bidaud pour une démonstration de déchaumage. Le robot avance, régulier, imperturbable. Les discussions s’animent : chacun se projette, imagine les usages, les limites, les opportunités.

Cette démonstration s’inscrit dans une dynamique déjà engagée : les premiers essais du projet ont démarré chez Sylvain Guillet à La Chapelle-du-Fest (Manche) : 22 hectares ont été semés du 27 au 29 octobre.
« L’AgXeed T2 a montré sa capacité à réaliser des semis autonomes avec une qualité de travail globalement très satisfaisante et un guidage fiable. L’agriculteur, d’abord réticent à déléguer, s’est déclaré très satisfait du résultat. «
De nouvelles expérimentations en cuma suivront au printemps 2026, pilotées localement par la Fédération des cuma Normandie Ouest.

Trois ans pour transformer l’avenir
Avec le soutien du Partenariat Européen pour l’Innovation – Région Normandie, le réseau des cuma engage un travail de fond pour rendre la robotisation aux champs accessible, collective et fiable.
